Petit village inscrit sur la liste des patrimoines culturels immatériels nationaux depuis 2012, Binh Duc est, avec Bau Truc, le seul de la Province de Binh Thuan – dans le Centre-Sud du Pays – à perpétrer l’art de la poterie traditionnelle cham.
Binh Duc, le village de potiers du peuple Cham, se situe sur la commune de Phan Hiep, district de Bac Binh, province de Binh Thuan, soit à environ 70 km au nord de la ville de Phan Thiet. La poterie et le tissage de brocatelles sont deux des métiers traditionnels exercés par les Cham de cette Province connue pour sa station balnéaire de Mui Ne. Deux villages de potiers perpétuent cet artisanat : Bau Truc - une destination populaire pour les voyageurs nationaux et étrangers - et Binh Duc, nettement moins connu. Binh Duc est aussi appelé village de poterie de Go, ce qui, en langue cham, signifie « pot ».
Pour se rendre au village de potiers cham de Binh Duc, il faut passer par Phan Thiet :
Les 200 kilomètres qui séparent l’ancienne Saigon de Phan Thiet peuvent se faire en train, en bus ou par vous-même. Le plus simple est de prendre un bus en gare routière de Mien Dong, il vous conduira en 4-5 heures à Phan Thiet. Mais vous pouvez également profiter de la station balnéaire de Mui Ne et vous réserver une escapade à Binh Duc. Prenez alors un Open Bus au départ des rues Pham Ngu Lao et De Tham (District 1), il vous débarquera à Ham Tien, Mui Ne. De Phan Thiet ou Mui Ne, rendez-vous à Binh Duc en xe ôm ou en taxi. Le train quant à lui met environ 3h45/4 heures pour vous emmener gare de de Phan Thiet. Et enfin, l’option la plus confortable et la plus flexible reste le mini-van ou la limousine privée avec chauffeur, une prestation pas aussi onéreuse qu’on peut le craindre, à réserver auprès d’une agence locale spécialiste du Vietnam.
Si vous êtes sur Hanoi ou tout autre grande ville du Vietnam, l’avion semble tout indiqué pour vous rendre d’abord dans la mégapole du Sud – HCM-ville – puis ensuite sur Phan Thiet. Selon votre ville de départ vous pouvez également envisager un vol pour Da Nang et ensuite terminer votre voyage en train, en bus…
La Province est rythmée par l’alternance d’une saison sèche - entre novembre et mars – et d’une saison humide, d’avril à octobre, avec un pic de moussons tropicales en septembre. Avec ces renseignements, choisissez en fonction de vos contraintes et projets (N’oubliez pas qu’une agence de voyage sur mesure peut vous aider dans l’élaboration de votre séjour).
À Binh Duc, les potiers Chams n’utilisent ni tour ni four. Ici, la cuisson est réalisée exclusivement au bois et en plein air. Autrefois prospère, le village s’est retrouvé, il y a quelques années, à manquer de matières premières (bois et argile en particulier) et a vu l’apparition de la production industrielle et d’une forte concurrence. Le nombre d’ateliers céramiques est alors passé de 100 à 64. Attachées à l’extraordinaire savoir-faire de ses artisans-potiers, les autorités de Binh Thuan ont réussi à mettre à leur disposition une importante réserve d’argile dans le village de Hai Thuy, rattaché au district de Bac Bin. En parenthèse, c’est la différence d’argile qui différencie la poterie de Binh Duc de celle de sa voisine, Bau Truc : les poteries de Bau Truc, fabriquées à partir d'argile récolté dans les champs, sont plus foncées que les poteries Go, fabriquée à partir d'argile collectée près de la rivière Phan, à la couleur rougeâtre claire naturelle.
Déambulant dans le village, le visiteur remarquera que les ouvriers sont majoritairement des ouvrières. Il ne manquera pas de percevoir la magie à l’œuvre en voyant se dérouler les étapes de la création d’une pièce : tout d’abord, saupoudrer la table d’un peu de sable blanc pour éviter que ça colle. Puis c’est le mouvement précis des mains (et du corps) autour de la table qui façonne le produit. Une fois la forme créée, elle est lissée avec un bambou et du tissu, puis elle est mise à sécher naturellement au soleil et au vent. Intervient ensuite la cuisson, à ciel ouvert, dans un foyer commun à tous les potiers. Poteries et bois de chauffage sont disposés en rangées horizontales, perpendiculairement au vent, pour diminuer les risques de casse (le vent chaud participe à la cuisson de la pièce, tout en diffusant de façon homogène la chaleur du foyer). L’ensemble est installé de la plus petite à la plus grande pièce, de la plus épaisse à la plus fine. Une cuisson prend 2-3 heures en fonction des produits et de leur quantité. La touche finale, qui est aussi la marque distinctive de la poterie Go, fait intervenir un liquide spécial à base de "quả thị" (un fruit de la même famille que le kaki) pour éclabousser les produits chauds juste après les avoir sortis du four, créant ainsi de superbes graphismes brun foncé. Une autre technique consiste à utiliser des colorants naturels issus de feuilles, de fruits des bois ou de basalte rouge. Les artisans cueillent les feuilles et l'écorce dans la forêt et les mettent à tremper dans l'eau pendant cinq ou six jours. Une fois la poterie cuite, les potiers éclaboussent les produits pour créer des motifs noirs et rouges aléatoires. Ce même visiteur, tout émerveillé qu’il soit, remarquera enfin qu’il existe deux types de produits en céramique Cham, la poterie domestique, avec ses casseroles et ses poêles et la céramique d’art.
Ce que notre visiteur ne verra pas, c’est l’exigence que demande le produit : il faut 4 jours pour fabriquer un article. La collecte de l’argile et du bois, la fabrication des teintures demandent également disponibilité et main d’œuvre (en plus du savoir-faire). Ce que le visiteur ne verra pas, c’est le nombre de villageois qui a préféré choisir un autre métier. Mais – et c’est le plus important – il verra la passion, le savoir-faire d’un métier qui renvoie aux premiers âges du monde, il comprendra la place – immense - que prend l’art de la poterie dans la vie des Cham.
Si vous désirez en savoir plus sur la culture Cham, prenez le temps de visiter les tours Po Sha Nu. Perches sur une colline, elles se situent non loin du village des potiers, à 6 km au nord-est de Phan Thiet. Considérées comme des chefs-d’œuvre de l'ethnie Cham, elles sont datées du 8eme siècle et appartiennent au style Hoa Lai. Du complexe d’origine, il ne reste que trois intactes et certaines ont perdu leurs ornements, mais le charme de leur beauté mystérieuse agit toujours…